Homélie du 22 novembre 2015 - Christ Roi

LE VIDE OU LA VERITE DU CHRIST

«Je suis né, je ne suis venu en ce monde que pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Tout homme qui écoute la vérité entend ma voix»

L’Evangile que nous venons d’entendre nous place face à la redoutable et inévitable question de la vérité. Et cette question est sans doute celle qui demeure face aux tragiques évènements qui ont frappé notre pays il y a dix jours : avec maintenant un peu plus de recul qu’au moment où nous étions submergés par l’émotion, nous devons nous dire : qu’est-ce que ces évènements nous disent de la vérité sur Dieu et sur l’homme, et de la vérité sur notre société ?

De la vérité sur Dieu, il faut d’abord dire ce qu’elle n’est pas. On ne rend pas honneur à Dieu en tuant, en massacrant, en fauchant des vies innocentes. Prétendre le faire « au nom de Dieu » est un épouvantable blasphème. Et on aimerait entendre tous les chefs religieux – et pas seulement ceux de l’église catholique et des autres confessions chrétiennes – le clamer avec plus de force. Il n’y a qu’une manière d’honorer Dieu – le cardinal Vingt-trois l’a dit dimanche soir dernier à Notre-Dame – c’est de prendre soin de l’homme : l’homme fragile, victime, menacé. Car la vérité sur Dieu est aussi la vérité sur l’homme, si l’homme est à son image. C’est en défendant la dignité de l’homme que l’on honore Dieu. En défendant la valeur sacrée de la vie humaine, du commencement jusqu’à son terme.

Mais les tragiques évènements de la semaine dernière nous obligent à nous poser la question de la vérité dans notre société même. Là encore, le cardinal Vingt-trois l’a dit avec force. Devant quel vide sommes-nous pour que des jeunes qui ont grandi dans notre société occidentale, qui ont été formés par notre système éducatif, ne trouvent d’autre issue à leurs existences que les phantasmes du califat islamique et ses pulsions de violence et de mort ? Madame le Maire de Paris a déclaré, paraît-il, que ces barbares s’en sont pris « aux valeurs de la République ». Mais qu’étaient leurs cibles, qu’ils ont déclaré eux-mêmes avoir « soigneusement choisies » ? Un match de foot, des terrasses de bistrots, une salle de concert de rock : ce sont donc ça, les « valeurs de la République » ? J’ai été épouvanté – vous l’avez été comme moi, si vous l’avez lu aussi – d’entendre que les malheureuses victimes du « Bataclan » s’apprêtaient à entendre une chanson intitulée, en anglais, Kiss the Devil, « embrasse le Diable ». Il arrive que le Diable se prenne au mot. Ces lieux, qui ont été l’objet de ce massacre, sont bien plutôt les lieux symboles du vide de notre société hédoniste et matérialiste, devant laquelle les sauvages qui ont agi se situent dans une attitude d’attirance et de répulsion, selon le mécanisme de la violence engendrée par le « désir mimétique », mécanisme qu’avait si lucidement analysé, dans toute son œuvre, le grand philosophe René Girard, qui vient de mourir…

Vous avez sans doute appris comme moi que le Maire de Lyon, d’une manière tout à fait compréhensible, avait décidé de supprimer la « Fête des Lumières », mais qu’il avait demandé que les lyonnais allument pourtant « de petites lumières à leurs fenêtres », sans aucunement faire référence à la signification de ce geste lorsque les lyonnais l’ont fait pour la première fois en 1852 ? Quel est le vide, l’amnésie programmée de nos sociétés, pour que nous n’ayons d’autre geste que d’allumer des bougies comme si nous avions peur du noir, alors que nous fermons volontairement notre esprit et notre cœur à Celui qui a dit : « Je suis la lumière du monde ? »

Nous fêtons aujourd’hui la fête du Christ-Roi. Le pape Pie XI l’avait instituée en 1925, dans le souvenir de la « boucherie inutile » de la guerre de 1914 – et les millions de mort de la grande guerre n’étaient pas le fait de barbares, mais de nations qui se disaient civilisées, et qui avaient été chrétiennes – Pie XI avait institué cette fête pour rappeler aux nations de la vieille Europe que si elles continuaient à oublier le Christ, elles allaient inévitablement vers d’autres catastrophes. La suite de l’histoire lui a donné cruellement raison. Jean Paul II – saint Jean-Paul II – au moment de la chute du rideau de fer, disait de même aux nations de l’Est qui se relevaient pantelantes de décennies d’emprise du communisme athée qu’il fallait « repartir du Christ ». Si nous ne repartons pas du Christ, le vide de notre société n’appellera que de nouvelles catastrophes.

Nous sommes exactement devant la scène de l’Evangile d’aujourd’hui. Le Christ se tient devant nous comme il se tenait devant Pilate, bafoué, moqué, couronné d’épines. Il se tient devant notre société, il se tient devant les dirigeants de nos sociétés, il se tient devant chacun d’entre nous. Et il nous dit ces mots :

« Je suis né, je ne suis venu en ce monde que pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Tout homme qui écoute la vérité entend ma voix »

Écouterons-nous la voix de la vérité, la voix du Christ qui nous assure qu’il est, lui et lui seul « le Chemin, la Vérité et la Vie ».
L’abbé Bruno Martin

Communiquons n°274 - Dimanche 22 Novembre 2015


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