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Conférence de Carême du 15 Mars - Christian Ratrema
samedi 21 mars 2015
HUMANAE VITAE, UNE ENCYCLIQUE PROPHETIQUE ET CONTESTEE
Nous sommes dans la synagogue de Capharnaüm, Jésus proclame qu’il est le Pain de vie : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et moi, je le ressusciterai au dernier jour ». Les auditeurs sont choqués ! Comment cet homme peut-il donner sa chair à manger ? Les disciples s’insurgent : « Cette parole est trop dure ! qui peut l’entendre ? » Aujourd’hui, ils diraient. C’est « inaudible » ! « Irrecevable » ! De nombreux disciples décident de s’en aller. Prenant acte de leur défection, Jésus s’adresse aux apôtres : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Simon-Pierre répond, au nom des Douze : « à qui irions-nous, Seigneur ? Tu as les paroles de la vie éternelle. »
L’histoire se répète le 25 juillet 1968, quand le Bienheureux Pape Paul VI publie l’encyclique Humanae Vitae, « en vertu du mandat que le Christ Nous a confié » (HV6), précise-t-il. Il subit la même incompréhension, la même contestation, la même défection. Il fait même la « une » de Paris Match : « Le pape est contre la pilule » ! Très mal reçue, Humanae Vitae « devint instantanément l’encyclique la plus controversée de l’histoire, (…) une véritable levée de boucliers s’ensuivit, ainsi que la plus vaste rébellion publique vis-à-vis des enseignements pontificaux depuis des siècles ». (G. Weigel, Jean Paul II, témoin de l’espérance, p 261-262). Pour la sociologue Danièle Hervieu-Léger : « c’est avec Humanae Vitae que les catholiques se sont radicalement écartés du Vatican en se disant : « Le pape peut dire ce qu’il veut dans ce domaine, je n’en tiendrai plus compte. »
Trois jours après la publication de l’Encyclique, le cardinal Martin vint faire part au Pape de son trouble devant l’ampleur de la contestation. Paul VI lui répondit : « Vous depuis trois jours, moi depuis quatre ans ! C’est mon Gethsémani ! »
Avant d’aborder le document lui-même, je vous propose d’écouter Paul VI, lors de son allocution du mercredi qui suit la publication de l’encyclique. Avec la simplicité familière de cet entretien hebdomadaire, il confie aux fidèles les sentiments qui l’ont guidé pour accomplir son mandat reçu du Christ. La citation est assez longue, mais elle nous donne une idée de la complexité, de la gravité et de l’ampleur des questions sur lesquelles il devait se prononcer. Et qui débordent largement la question de la contraception. L’occasion nous est donnée de nous mettre à l’écoute de son cœur de Père et de Pasteur.
« Notre premier sentiment fut celui de Notre grave responsabilité. Il Nous a fait entrer et demeurer au cœur de la question durant les quatre années consacrées à l'étude et à l'élaboration de cette encyclique. Nous vous confierons que ce sentiment Nous a fait beaucoup souffrir spirituellement. Jamais Nous n'avons senti comme en cette circonstance le poids de Notre charge. Nous avons étudié, lu, discuté autant que Nous avons pu, et Nous avons aussi beaucoup prié. (…) Nous devions répondre à l'Eglise, à l'humanité entière; Nous devions évaluer (…) une tradition non seulement séculaire, mais récente, celle de Nos trois prédécesseurs immédiats; Nous étions obligé de faire Nôtre l'enseignement du Concile que Nous avions Nous-même promulgué; Nous étions enclin à accueillir, jusqu'à la limite où il Nous semblait pouvoir aller, les conclusions - bien que de caractère consultatif - de la commission instituée par le Pape Jean XXIII et élargie par Nous-même, sans perdre de vue notre devoir de prudence; Nous n’ignorions pas les vives controverses suscitées par cette question si importante (…); Nous entendions les voix puissantes de l'opinion publique et de la presse; Nous écoutions les voix plus faibles, mais plus pénétrantes pour Notre cœur de père et de pasteur, de tant de personnes, de femmes respectables spécialement, angoissées par ce problème difficile et par leur expérience encore plus difficile; Nous lisions les rapports scientifiques sur les alarmantes questions démographiques du monde, étayées par des études d'experts et par des programmes gouvernementaux; Nous recevions de toute part des publications, dont quelques-unes inspirées par l'examen de certains aspects scientifiques du problème, d'autres par des considérations réalistes de situations sociologiques nombreuses et graves, ou encore par celles, si impérieuses aujourd'hui, des changements qui se produisent dans tous les secteurs de la vie moderne. Combien de fois avons-Nous eu l'impression d'être comme submergé par cette accumulation de documents, et combien de fois — humainement parlant — avons-Nous ressenti combien Notre pauvre personne était dépassée par ce redoutable devoir apostolique de Nous prononcer à ce sujet ! Combien de fois avons-nous tremblé devant le dilemme d'une condescendance aux opinions courantes, ou d'une sentence mal supportée par la société moderne, ou qui soit arbitrairement trop lourde pour la vie conjugale ! Nous avons consulté en particulier beaucoup de personnes de haute valeur morale, scientifique et pastorale; et invoquant les lumières du Saint-Esprit, Nous avons mis Notre conscience dans la pleine et libre disposition à la voix de la vérité, cherchant à interpréter la règle divine que Nous voyons surgir de l'exigence intrinsèque de l'amour humain authentique, des structures essentielles de l'institution du mariage, de la dignité personnelle des époux, de leur mission au service de la vie, comme de la sainteté du mariage chrétien. Nous avons réfléchi sur les éléments stables de la doctrine traditionnelle de l'Eglise, spécialement sur les enseignements du récent Concile. Nous avons pesé les conséquences de l'une ou de l'autre décision, et Nous n'avons plus eu de doute sur Notre devoir de Nous prononcer dans les termes exprimés par la présente encyclique. »
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Conférence de Carême du 1er Mars - Bernard Malcurat
jeudi 5 mars 2015
LA FOI DE L'EGLISE DANS L'EUCHARISTIE :
L'ENCYCLIQUE "MYSTERIUM FIDEI" (1965)
I - Introduction
L’encyclique «Mysterium fidei» est la troisième encyclique du Pape Paul VI. Après «Ecclesiam suam» (L’Eglise du Christ) encyclique sur le dialogue dans l’Eglise et hors de l’Eglise, publiée le 6 août 1964 et «Mense Maio» (Le mois de mai) sur la Vierge Marie, datée du 29 avril 1965, l’encyclique «Mysterium fidei», (Mystère de foi) sur l’Eucharistie, est parue le 3 septembre 1965. Remarquons déjà que si la première encyclique est donnée «a nos vénérables frères, patriarches, primats, archevêques, évêques et autres ordinaires, en paix et communion avec le siège apostolique, au clergé et aux fidèles de l'univers, ainsi qu'à tous les hommes de bonne volonté», «Mense Maio» n’est offerte qu’ «aux Vénérables Frères Patriarches, Primats, Archevêques, Evêques et autres Ordinaires des lieux en paix et communion avec le Saint Siège» ce qui s’explique par sa spécificité mariale et «Mysterium fidei» «A Nos Vénérables Frères les Patriarches, Primats, Archevêques, Evêques et autres Ordinaires des lieux, au clergé et aux fidèles du monde entier» et non pas à tous les hommes de bonne volonté, puisqu’elle traite spécifiquement de l’Eucharistie.
Il me semble important, dans un premier temps de situer cette encyclique «Mysterium fidei» parmi les nombreux événements de ces années 60.
- 28 octobre 1958 : Angelo Roncalli est élu Pape : il prend le nom de Jean XXIII
- 11 octobre 1962 : Jean XXIII ouvre le Concile Vatican II
- 3 juin 1963 : Mort de Jean XXIII
- (il sera béatifié le 3 septembre 2000 par Jean-Paul II et canonisé le 27 avril 2014 par le Pape François)
- 21 juin 1963 : Le Cardinal Giovanni-Battista Montini, archevêque de Milan, est élu Pape : il prend le nom de Paul VI
- 22 juin 1963 : Dans son discours aux cardinaux dans la Chapelle Sixtine, il annonce sa volonté de poursuivre les travaux de Vatican II : « La partie la plus importante de notre pontificat sera occupée par la continuation du deuxième concile œcuménique du Vatican, vers lequel sont tournés les yeux de tous les hommes de bonne volonté. »
- 4 décembre 1963 : Promulgation de la constitution « Sacrosanctum Concilium »
- 3 septembre 1965 : Paul VI signe l’encyclique « Mysterium Fidei »
- 8 décembre 1965 : Paul VI clôture le Concile « Vatican II »
De nombreux documents seront promulgués tout au long du Concile, dont neuf décrets et trois déclarations, mais surtout quatre constitutions (document qui légifère sur des questions de dogme ou d'administration de l'Eglise) :
- le 4 décembre 1963, la constitution « Sacrosanctum concilium » sur la sainte Liturgie ;
- le 21 novembre 1964, la constitution dogmatique (l'adjectif "dogmatique" indique que l'objet de cette constitution est les vérités de la foi) « Lumen gentium » sur l’Eglise ;
- le 18 novembre 1965, la constitution dogmatique « Dei verbum » sur la Révélation divine ;
- le 7 décembre 1965, la constitution pastorale (l'adjectif "pastoral" signifie que l'objet de cette constitution est de proposer des orientations et déterminations concernant la vie chrétienne dans les circonstances historiques de notre temps) « Gaudium et spes » sur l’Eglise dans le monde de ce temps.
Vous aurez sans doute remarqué que la constitution « Sacrosanctum concilium » a été la première à être promulguée. Les débats furent vifs sur la langue liturgique et la concélébration (326 interventions orales et 600 écrites entre octobre 1962 et décembre 1963). Toutefois, la Constitution fut adoptée presque à l’unanimité, avec 2 147 placet contre 4 non placet. La réforme des rites et des livres liturgiques sera entreprise presque aussitôt après, et confiée au Conseil pour l’application de la constitution sur la Liturgie (Consilium), créé en février 1964, ainsi qu’aux conférences épiscopales. « C’était un programme, dont il faut bien reconnaître qu’il a entraîné une dynamique qui n’était pas explicitement écrite dans le texte du Concile », relève le Père Paul de Clerck, théologien belge, éminent liturgiste.
La réforme fut accueillie très rapidement par les fidèles, heureux de s’approprier ce « trésor caché ». Bien que les Pères conciliaires aient pris des dispositions pour que cette réforme puisse s’appliquer facilement, en particulier en soulignant la place des organismes compétents, son application suscita aussi des tensions dès les premières années. Dans sa lettre apostolique du 4 décembre 1988, pour le 25ème anniversaire de la promulgation de la constitution « Sacrosanctum concilium », le Pape Jean-Paul II n’hésita pas à parler d’ « innovations fantaisistes » pour la mise en place de cette réforme, affirmant aussi que ces déviations, « loin d’être liées à la réforme liturgique elle-même, ou aux livres qui en sont issus, lui contreviennent directement, la défigurent ».
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